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22 septembre 2010 3 22 /09 /septembre /2010 12:55

Voyage en Lorraine de Sa Majesté l’Impératrice et de S.A. le Prince Impérial

 

« Le samedi 14 juillet, on pavoisait la gare du chemin de fer de l’Est. A dix heures et demie, le train impérial était prêt. Le service de la maison de l’Empereur s’organisait dans l’appartement de voyage de Leurs Majestés. Malgré les stores baissés des wagons privés, un coup d’œil indiscret nous permet de dire toute la coquetterie déployée dans ces intérieurs mignons. Le salon à manger, chef-d’œuvre d’ornementation sculptée, a des sièges de cannes légers et confortables à la fois. La table, comme celle des navires, est percée de trous qui assurent les verreries contre les mouvements de lacet trop prononcés. La voiture-terrasse vient ensuite. Ce wagon sert à la fois de vestibule et de promenoir. Sa balustrade en fonte polie est une merveille. Dans le salon, ou plutôt le boudoir, se trouve le trône de Leurs Majestés – et des canapés pour les dames qui accompagnent. Trois chambres à coucher viennent ensuite, toutes capitonnées de soie mauve, bleue et blanche.

 

Mais onze heures sonnent, les employés sont à leurs postes. M. Sauvage, directeur de la Compagnie de l’Est et plusieurs administrateurs sont présents pour recevoir l’Impératrice et le jeune Prince. Les privilégiés, dont nous avons l’orgueil de faire partie, des membres de la presse et des artistes attendent, pour prendre place dans un wagon spécial du train, que Sa Majesté et Son Fils aient paru.

 

Ce n’est point une illusion, c’est l’Empereur lui-même qui s’avance donnant le bras à l’Impératrice. Le Prince Impérial marche seul devant eux.

 

Derrière viennent le général Fleury, premier écuyer, le baron de Bourgoing, le général Frossard, le baron Corvisart, médecin ordinaire, le baron de Pierres, premier écuyer de Sa Majesté l’Impératrice, le marquis de Piennes, premier chambellan, Mme de Lourmel, la comtesse de Poèze, la comtesse de Rayneval, dames du Palais, le capitaine du génie Lamey, officier d’ordonnance de l’Empereur, M. Bachon, écuyer de Son Altesse le Prince Impérial, M. Barthez, son médecin, et M. Monnier, son précepteur.

 

Nous nous demandons tout bas si, malgré sa décision prise de renoncer au voyage, Sa Majesté l’Empereur aurait changé d’idée. L’espoir nous en vient un moment, quand l’Empereur, ayant fait d’abord monter le jeune Prince, puis l’Impératrice, monte lui-même à son tour. Mais les adieux se font. Leurs Majestés se quittent. Nous sommes en voiture. La locomotive pousse son cri d’avertissement et le train s’envole aux acclamations enthousiastes des employés qui couvrent les quais de la gare et de la foule qui se presse aux alentours.

 

En route nous ne sommes plus que de simples voyageurs dont toute la préoccupation est de se garantir du soleil et de la poussière. Mais le train impérial a cet avantage qu’il va plus vite que les autres et qu’on n’arrêt que rarement.

 

Nous arrivons à Epernay. C’est la première station du voyage officiel. Une notable partie des habitants du département de la Marne s’y était donnée rendez-vous. A l’endroit où s’arrêt le wagon, duquel doivent descendre Sa Majesté et Son Fils, le préfet et les autorités attendent les augustes visiteurs.

 

Nous remarquons que, pendant le trajet, Sa Majesté a changé de toilette. Au départ, Elle était en costume de voyage et portait une simple robe de piqué rose et blanc. A ce moment, elle avait une robe de soie bleue et blanche richement ornée. Un ample et léger burnous blanc l’enveloppait tout entière, et elle était coiffée d’un chapeau presque invisible, mais d’un goût exquis.

 

On quitte la gare. Dans le vestibule, les demoiselles d’Epernay viennent offrir des fleurs, l’une d’elles dit un compliment à S.M. l’Impératrice qui l’embrasse sur le front et lui adresse quelques gracieuses paroles. On traverse une place, sous une tente légère formant couloir, entre deux haies de paysans et de pompiers qui poussent les cris les plus enthousiastes. Une formidable fanfare joue l’air de la reine Hortense. On arrive sur une estrade abritée, mais malheureusement dressée en plein soleil. S.M. l’Impératrice, après y être demeurée une grande heure à voir défiler les communes et à répondre par les plus affables paroles aux nombreux compliments qui lui ont adressés, s’est presque trouvée mal, tant la chaleur était suffocante. Elle s’est retirée un moment. Quelques minutes après, S.M. distribuait avec une grâce charmante, des décorations et des médailles.  Un vieux grenadier de la ligne s’est avancé sac au dos et présentant l’arme. L’Impératrice lui a attaché la croix. Le soldat était très ému. Une grosse larme de bonheur tomba sur sa moustache. L’Impératrice, toute souriante et pleine de bonté, ne pouvant pas le sacrer autrement chevalier, lui donna une poignée de main.

 

Quelques minutes après, le train impérial repartait et s’arrêtait à Châlons. Les équipages de l’Empereur attendaient à la gare, un peloton de cent-gardes et des chasseurs à cheval formaient l’escorte.

 

La réception de S.M. l’Impératrice à la cathédrale, par Mgr de Châlons, a été rempli de grandes émotions. Le discours de l’évêque a produit une grande impression sur S.M. Il lui a fait en quelques paroles l’historique du temple où elle s’agenouillait. Il a pleuré sur les profanations occasionnées à la vieille basilique aux époques désastreuses des invasions étrangères, et, faisant allusion à de grandes actualités, il a exprimé la conviction que ces malheurs ne se renouvelleraient plus.

 

Après le Te Deum, le cortège impérial gagna l’hôtel de la Préfecture. L’Impératrice et le Prince Impérial y prennent quelque repos.

 

Un peu plus tard, devait avoir lieu la réception officielle des autorités et des fonctionnaires du département. Dans le salon d’honneur de la Préfecture, un trône avait été dressé. Deux portraits en pieds de LL. MM. décorent cette pièce qui donne, par un perron, sur de magnifiques jardins, dont la perspective s’étend jusqu’à la célèbre promenade du Jard.

 

S.M. l’Impératrice et le Prince Impérial vinrent se placer sur le trône. Le jeune Prince, à ce moment, était en toilette de cérémonie. Il était vêtu de velours noir et portait le grand-cordon de la Légion d’honneur et la plaque.

 

Après le défilé des autorités civiles et militaires, on introduisit les officiers et les sous-officiers des différentes armes de la garnison, qui devaient recevoir des décorations. L’Impératrice les fit ranger en demi-cercle, descendit du trône et vint tour à tour leur attacher la croix sur la poitrine. Arrivé au dernier officier, S.M. fit une profonde révérence et dit à haute voix : « Je suis heureuse d’avoir été chargée par l’Empereur de vous distribuer ces décorations que vous avez si bien méritées. » Les militaires répondirent par le cri plusieurs répété de Vive l’Empereur ! Vive l’Impératrice ! Vive le Prince Impérial !

 

L’Impératrice et le Prince parcoururent ensuite les jardins, où ils passèrent en revue l’Ecole impériale des Arts et Métiers et son excellente musique, le lycée, le séminaire et les maires des communes.

 

A sept heures, les portes de l’Hôtel de ville s’ouvraient pour les invités du bal. Nous y avons remarqué le général Bourbaki, venu du camp avec tout son état-major pour saluer S.M.

 

A dix heures et demie, l’Impératrice faisait son entrée, et les dames de Châlons, dans leurs plus beaux atours, lui faisaient une chaleureuse ovation. L’Impératrice était en blanc avec une robe garnie de feuillages où scintillaient les diamants. Sa coiffure, qui lui allait à ravir, était formée de fleurs en brillants et de feuilles vertes.

 

Le Prince Impérial n’assistait pas au bal. S.M. a dansé avec M. le général Philippe, maire de Châlons. Le prince Murat lui faisait vis-à-vis avec une demoiselle de la ville. Le préfet de Châlons, M. Périer, député et maire d’Epernay, et deux autres dames complétaient le quadrille impérial.

 

A onze heure et quart, l’Impératrice se retirait.

Châlons était brillamment illuminé, malgré une légère pluie d’orage.

 

Le lendemain, à neuf heures et demie, la même foule qui les avait acclamés la veille disait adieu aux augustes voyageurs qui poursuivaient leur route pour Nancy ».

 

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